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Communautés et écriture en ligne

Histoire, devenir, un dialogue

Informations
  • Résumé
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Texte

Introduction

Lorsqu’on s’intéresse à la question de la relation entre web et littérature, et par conséquent de celle de l’écriture et de la lecture sur les supports numériques, on fait face à une série de problématiques concernant : le tournant technologique de la production littéraire, ses répercussions sur les notions d’auteur, de littérarité, de littérature. Le dialogue qui s’est tenu dans le cadre du colloque « L’écrivain et la machine. Figures de l’auteur à l’ère du numérique » (Rome, 5-6 mai 2022) explore certaines de ces problématiques tout en évoquant le parcours de Benoît Vincent, auteur emblématique de ce dialogue entre papier et numérique d’une part, et entre travail personnel et production collective d’autre part.

Elisa Bricco : Petite poucette est un bref essai où Michel Serres a réfléchi sur la révolution numérique et sur l’emprise des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans notre existence. Plutôt que de se plaindre des changements en acte, le philosophe rend compte des transformations et regarde avec bienveillance les opportunités qui s’ouvrent pour les jeunes – qui utilisent leur pouce pour manipuler leur portable devenu désormais un prolongement de leur corps – de composer avec les nouvelles perspectives sociales, épistémologiques, politiques. Serres admet néanmoins que, sans doute, la forme du livre papier comme support pour la lecture maintient inaltéré son attrait, malgré les tentations du numérique. La forme-livre persiste dans la plupart des activités liées à l’écriture et à la lecture :

Ce format-page nous domine tant, et tant à notre insu, que les nouvelles technologies n’en sont pas encore sorties. L’écran de l’ordinateur – qui lui-même s’ouvre comme un livre – le mime, et Petite Poucette écrit encore sur lui, de ses dix doigts ou, sur le portable, des deux pouces. Le travail achevé, elle s’empresse d’imprimer. Les innovateurs de toute farine cherchent le nouveau livre électronique, alors que l’électronique ne s’est pas encore délivrée du livre, bien qu’elle implique tout autre chose que le livre, tout autre chose que le format transhistorique de la page. (Serres 2022)

À partir de ce constat, nous nous interrogerons sur les atouts de la littérature écrite sur internet, sur les opportunités que l’outil numérique met à la disposition des auteurs, sur les enjeux de la publication en ligne et de l’écriture collective. Benoît Vincent, vos travaux exploitent toutes les ressources possibles : du carnet d’écriture au chantier en ligne, de la performance à la publication papier. Vous avez également participé à différentes expériences collectives (d’envergures très différentes) comme la revue en ligne Hors-Sol avec Parham Shahrjerdi, L’Air nu de Joachim Séné, Anne Savelli et Mathilde Roux, et Ourdir, festival de poésie-performance co-organisé par Philippe Aigrain, qui a connu trois éditions (entre 2017 et 2021), et surtout comme membre actif du collectif Général Instin. En outre, vous avez contribué (comme coéditeur de la collection « Essais ») à la métamorphose des éditions Publie.net, toujours autour de Philippe Aigrain jusqu’à la disparition de celui-ci.

Benoît Vincent : Bonjour et merci aux organisateurs ainsi qu’à Elisa pour cette invitation, et merci de ce rapide tour d’horizon à travers le prisme du collectif. Je pourrais encore ajouter que je suis également l’auteur de livres que je n’ai pas écrits, comme L’éclat, publié chez L’Harmattan par un homonyme, et que je retrouve régulièrement sur les étals ou dans les bases de données associé à mes propres ouvrages. Cela illustre la grande variété et la grande fluidité de mon travail j’imagine…

E.B. : Je voudrais commencer par évoquer deux réalités : la fascination de la création avec le numérique et en contexte numérique ; l’essor des écritures collaboratives en ligne, sous la bannière du partage et de la participation démocratique, lesquelles nous offrent différents aspects de l’irruption et du développement des outils « digitaux » (Le Deuff 2019) dans la pratique de l’écrivain, ou de l’« écranvain », ainsi que l’appelle Gilles Bonnet (2017).

B.V. : Oui j’en profite pour souligner que le choix de ce mot, « digital », évident pour un italophone, l’est beaucoup moins pour un francophone (où le mot « numérique » prend le dessus). L’un des essais que nous avons publiés chez Publie.net, d’Olivier Le Deuff, fait justement le point sur la terminologie. C’est un point qui me paraît intéressant, comme accroche, car il permet de ramener du corps (les doigts de la main chère aux lecteurs de Leroi-Gourhan) dans des processus qui paraissent a priori uniquement mécaniques…

Perspective 1 : les atouts de la reproductivité technique au service de l’écriture littéraire

E.B. : Le livre de Michel Serres cité plus haut, publié dans la collection « Manifeste » au Pommier, porte une espèce de long sous-titre qui pointe directement l’attention sur les enjeux de la révolution numérique : « Le monde a tellement changé que les jeunes doivent tout réinventer : une manière de vivre ensemble, des institutions, une manière d’être et de se connaître… ». On a envie de dire : « quelle responsabilité ! » et on pourrait d’ailleurs se demander si cette tâche incombe uniquement aux jeunes. Et nous pourrions aussi ajouter à la liste des pratiques et des instances qui doivent être repensées l’écriture et la création artistique en général. Depuis la naissance de l’informatique et plus généralement des techniques liées à la reproductivité, on a en effet pu croire que l’espace littéraire pouvait s’ouvrir sur d’infinies possibilités de développement et de renouvellement des pratiques comme des formes. Après plus de vingt ans de recherche sur les enjeux du numérique et de la pratique de l’écriture digitale, il est peut-être temps de tenter de tirer quelques conclusions. Comme nous l’avons vu ce matin, il est intéressant de suivre la trajectoire créative de François Bon qui s’est jeté à corps perdu dans le cyberespace, en construisant une œuvre littéraire et critique à multiples facettes et sur des supports variés : des sites et blogs, de Remue.net au Tiers Livre, aux éditions numériques, Publie.net, jusqu’aux réseaux sociaux dont YouTube.

B.V. : Sans François, je ne serais pas là, c’est un fait. Nous nous sommes rencontrés lors d’une lecture sur les Rolling Stones (Bon 2002) à Grenoble au tout début des années 2000, et tout ce qui s’en est suivi, dans la dynamique et l’amitié a été très formateur, j’y reviendrai. Mais François est un lanceur d’alerte littéraire, en quelque sorte, il est une véritable boîte à projets… et il ne craint pas de les faire évoluer vers le collectif. Simplement, la fascination qu’il a pour le digital a pu m’éloigner parfois de ses préoccupations - même si Après le livre (Bon 2011) ou Tumulte (Bon 2006), qui sont des livres papier d’ailleurs, ont souvent nourri mon travail. Je propose une lecture serrée d’Après le livre dans La littérature inquiète (Vincent 2020), mon dernier essai qui traite particulièrement d’écriture… Et le rôle de François est, à mon avis, extrêmement représentatif de notre approche en fascination/méfiance de tout un groupe d’auteurs, plus ou moins de « mon » âge, et qui avons été « propulsés », en quelque sorte, par François : je pense à Maïsetti, à Séné, à Vissac, par exemple. Mais c’est toute une constellation d’auteurs dont il s’agit…

E.B. : Avant d’en venir à ton expérience avec la création collective en milieu digital, je voudrais m’arrêter encore un moment sur les enjeux de l’écriture avec le numérique. La révolution qui nous occupe peut être comparée à celle de la photographie qui a investi le monde de l’art à partir des années 30 du XIXe siècle et qui a profondément ébranlé le champ artistique. La ressemblance ne concerne pas seulement les potentialités créatives des nouvelles technologies, mais la réaction des praticiens aussi. Dans un volume consacré à l’empreinte de la photographie sur la littérature – qui se pose dès le titre dans le sillage de la discussion benjaminienne sur l’art et sur la reproductibilité technique (Benjamin, s. d.) –, Pierre Piret réfléchit aux réactions du système littéraire lors de l’impact avec l’industrialisation de la production littéraire et artistique :

En toute hypothèse, la littérature aurait donc répondu à cette mutation et aux malaises qu’elle a générés. D’une part, on sait que comme toutes les formes artistiques, la littérature a elle-même été prise dans le mouvement et s’est trouvée affectée, au plan rhétorique par exemple, par les procédés nouveaux, qu’elle a d’ailleurs largement empruntés. D’autre part, étant donné la position analytique spécifique qui est la sienne, elle n’a cessé d’interroger cette mutation, d’en saisir les effets et les implications dans le lien social, enfin, d’y répondre par l’invention de formes discursives nouvelles. (Piret 2007)

La littérature a réagi en intégrant progressivement le nouveau média technique, et n’a cessé de s’interroger sur les manières d’opérer cette incorporation. Une révolution technique, ou pour mieux dire technologique, similaire à celle qui s’est développée au XIXe siècle, a transformé notre manière d’appréhender la réalité depuis les années 1990. La révolution digitale, qui a impliqué l’invasion progressive de l’outil informatique dans notre vie privée et professionnelle, a provoqué un changement dans les pratiques de la production culturelle et plus spécifiquement littéraire comparable à l’invention de Gutenberg.

B.V. : Vraiment ? Est-ce une révolution, ou un bouleversement, ou simplement un déplacement ? J’en profite pour évoquer ici un texte très intéressant de Pascal Quignard, Liber (dans les Petits traités (1990), mais celui-ci excède cent pages !) et que François Bon, avec qui j’en ai longuement parlé, a beaucoup mobilisé dans Après le livre (Bon 2011) : Quignard médite sur la création de la page, des marges, des lettrines, des espaces, de certaines lettres de l’alphabet, etc., bref de la matérialité du texte, en quelque sorte, entre l’objet livre/papier et œuvre littéraire : le texte en tant qu’objet de mise en page.

Mais aujourd’hui, est-ce que les transformations sont de même nature ? En va-t-il de la matérialité du site internet, de l’html ? Guillaume Vissac, Joachim Séné, qui posent ces questions plus pertinemment que moi, se heurtent à cet obstacle : s’agit-il de la même “perturbation technique” ? On peut se demander par exemple : pourquoi on met des notes en bas de page, quand le concept de page n’est plus strictement nécessaire ? Ou pourquoi tous nos documents, traitements de texte, pdf, etc. sont-ils orientés verticalement quand nos écrans le sont horizontalement ? J’avais par exemple imaginé la page d’accueil de mon site Amboilati en format paysage… mais ça n’a pas été très concluant, puisque le lecteur ne sait pas, intuitivement, scroller sur les côtés !

E.B. : Vous avez raison, les habitudes sont difficiles à changer. Or, dans le contexte des grandes mutations qui ont engendré la naissance de nouvelles pratiques d’écriture et de circulation culturelle en milieu numérique, il me semble opportun d’observer les effets, pour l’écran ou pour l’œuvre, du passage à la machine comme support pour l’écriture, ainsi que le pointe Isabelle Krzywkowski dans Machines à écrire : Littérature et technologies du XIXe au XXIe siècle :

Le passage du médium biologique (la main) au médium machinique, et du médium technique (le livre) au médium technologique conditionne un changement de pratiques qui n’est cependant possible qu’autant que les auteurs admettent – et recherchent – un bouleversement du champ artistique. Car, répétons-le, le paradoxe de cette rupture est qu’elle n’est pas nécessaire – et c’est bien ce qui la rend si dérangeante. Sans doute convient-il de se demander si cette évolution constitue une phase d’appropriation, qui serait amenée à disparaître du fait de la banalisation des nouveaux médias. (Krzywkowski 2017)

L’idée, que le passage d’un support à un autre ne soit absolument pas nécessaire pour un auteur est très stimulante, puisqu’elle met en relief l’importance du choix personnel et, en perspective, aussi de la volonté de se conformer aux enjeux de la société. En effet, s’il est vrai que le travail d’écriture sur support numérique n’engendre pas de « changements des pratiques », on pourrait se demander pourquoi on change le support, et la réponse pourrait être que cela est redevable de la facilité d’élaboration des textes, de la possibilité d’en garder toutes les versions sur un seul support et de travailler n’importe où avec ses dispositifs à disposition. Donc, on renonce à l’encre et au papier pour écrire, mais le fondement de cette pratique reste le même. Pourtant la réalité n’est pas si simple, c’est-à-dire que les enjeux sont multiples et diversifiés.

Perspective 2 : l’essor du numérique et la fascination de la publication « libre »

Dans un récent essai au titre très évocateur : « Infections toxiques et contaminations fertiles de la littérature par le numérique », Alexandra Saemmer rend compte de son expérience de créatrice numérique qui a vécu l’effacement de son compte fictif de Facebook où elle élaborait ses œuvres :

J’ai perdu à ce moment plus d’une année de matériaux plastiques et textuels. J’ai compris dans ma chair ce que je savais déjà : que tout usager d’un dispositif d’écriture et de publication industriel écrit non seulement avec ses producteurs, mais chez eux. De nombreuses œuvres numériques ne sont pas seulement consignées par des entreprises de software ; quand elles sont créées et publiées sur les plateformes industrielles, elles leur appartiennent. (Canty et al. 2022)

Ce qui interroge encore la notion d’auctorialité aujourd’hui est la possibilité de voir son travail disparaître sans avoir aucune emprise sur celui-ci, mais cela n’est pas l’unique problème, Saemmer affronte aussi celui de l’obsolescence des outils numériques qui minent de l’intérieur la possibilité de survie des œuvres et donc aussi des auteurs :

Le fait que les aléas de l’actualisation d’une œuvre sur une machine de lecture précise échappent à son auteur, que l’œuvre s’effiloche au fil de l’évolution des dispositifs, que son interprétation change donc non pas seulement parce que les « grammaires de reconnaissance » ne sont jamais les mêmes d’un lecteur à l’autre, mais aussi parce que sa matérialité même est instable, constitue une caractéristique fondamentale de l’œuvre numérique. (Canty et al. 2022)

Cette réflexion apporte de l’eau à notre moulin : en effet, l’une des spécificités du digital étant précisément de faciliter le partage, voire la création collective.

B.V. : Ici on touche à une vraie question, qui est selon moi de deux ordres (et qui poursuit la perspective première). D’abord on décèle la vieille distinction entre canal et contenu, sur laquelle on ne va pas revenir ici, puisqu’elle est familière à tous je pense, et qui se dédouble en une distinction presque plus subtile entre hardware et software. Assurément, n’importe quel auteur avisé ne se laisserait pas berner par de telles grossières dichotomies, chacun sait que le mot chien ne mord pas et que ce qui compte est l’œuvre, indépendamment du support qui éventuellement la rend accessible. Mais alors on peut se demander pourquoi, pratiquement à tous les coups, ces œuvres intemporelles et immatérielles se prennent à chaque coup les pieds dans le tapis, par exemple le piège des GAFAM ? Pourquoi utilise-t-on tel traitement de texte ou tel réseau social plutôt qu’un autre ? Au point que je me suis demandé à un certain moment, en voyant les pratiques des collègues, s’il fallait nécessairement un MacIntosh pour être un véritable écrivain ?

Une autre dimension rigolote, aussi : on pourrait se demander si la disparition inopinée du texte, du fait d’une panne, de quelque nature soit-elle, par exemple, n’agit pas comme le retour du refoulé : le retour du matériel, tout comme la liasse de feuilles craignait l’orage, l’incendie, le vol ou la perte ? Quelle espèce de plus-value, encore une fois, ou même de garantie, offrirait l’écran sur le papier ? Dans un monde où l’électricité n’ira peut-être plus de soi, que ferons-nous de nos œuvres en ligne ?

E.B. : Aujourd’hui, sans doute grâce à la pénétration dans nos vies des outils numériques et des réseaux sociaux, tout le monde peut écrire, et tout le monde écrit sur des écrans. Dans le milieu de l’édition, les manuscrits pullulent…

B.V. : Je confirme en passant : c’était le cas chez au Nouvel Attila, mais c’était également le cas chez Publie.net, et même pour Hors-Sol : nous recevons des dizaines et des dizaines de propositions continuellement…

E.B. : Néanmoins, on constate que presque personne ne lit et presque aucun livre ne se vend. De plus, mais nous aborderons cela plus tard, tout le monde veut publier un roman.

B.V. : Cela peut paraître abrupt, comme constat. Et pourtant les livres se vendent très mal ; chez Publie.net, on a beaucoup réfléchi à la question du lectorat. On a trouvé plusieurs études, plus ou moins empiriques, qui évaluent le volume du lectorat de la littérature extrême contemporaine entre 2 000 et 5 000 lecteurs. On en est là ; mais il faut également souligner que ces mêmes études il y a 70 ans, lorsque renaissait la NRF par exemple, produisaient peu ou prou les mêmes chiffres ; l’historien de service, Auguste Anglès, évaluait le lectorat de la Nouvelle nouvelle revue française à trois ou quatre mille unités.

E.B. : C’est la démocratisation, elle aussi un peu trompeuse, parce que la naissance de l’auteur est en vérité une élection : l’auteur n’est justement pas tout le monde. Et Thierry Crouzet dans « La littérature numérique est morte » demande à ce propos :

Est-ce qu’au XIXe siècle il y avait des colloques sur l’auteur à l’ère de la plume d’oie taillée, ou des colloques sur l’auteur à l’ère de la plume Sergent-Major (1856) ou de la machine à écrire (1872) ? Personne n’a eu cette idée saugrenue. Parler des auteurs à l’ère numérique, d’auteurs numériques ou de littérature numérique nous enferme, nous étouffe, nous arrache au champ de la littérature. Nous nous en excluons nous-mêmes, et pour cause nous ne nous mélangeons presque jamais à ceux qui ne sont pas de notre paroisse. (Crouzet 2018)

Et il nous suggère que chacun peut choisir de devenir auteur simplement par l’impression de ses écrits :

J’ai imprimé l’intégralité de mon blog il y a quelques mois pour me prouver à moi-même qu’il était une œuvre comme une autre, pour le ranger à côté de mes autres livres, le ranger à côté des livres des autres, pour l’inscrire matériellement dans l’histoire de la littérature. (Crouzet 2018)

B.V. : Oui… à voir si cela trouve une confirmation dans la réalité. Je crois que le bon sens, comme l’intuition, disent le contraire… J’ai moi-même commencé à écrire dans des carnets, les mêmes qu’aujourd’hui, en 1994 ; mes premiers textes publiés en revue (dans une vraie revue, Voix d’Encre) l’ont été en 2001 ; les premiers ouvrages à compte d’éditeur (oui certes, numérique, chez Publie.net) en 2008 ; enfin le premier roman papier, Farigoule Bastard, chez Attila en 2015 (Vincent 2015) ; comme je l’avais écrit lorsque j’ai relu tous mes carnets à l’occasion de leurs 20 ans, il faut beaucoup écrire avant d’écrire (ici tous les sept ans !). Jusqu’à Farigoule je n’existais littéralement pas comme auteur : pas de visibilité (sinon sur les réseaux amis), pas de signature ou de lecture, pas de résidences possibles. C’est aussi ça l’économie du livre : celle de l’auteur et de toute la chaîne dont il est le premier maillon. Chacun peut en effet glisser ses notes dans n’importe quelle bibliothèque, mais je crois que personne n’est dupe : la figure symbolique de l’auteur, ce petit démiurge, maintiendrait encore son emprise sur l’inconscient collectif (la société). L’auteur impressionne – à défaut d’imprimer ! L’expérience du Général Instin, vue de l’extérieur, comme de l’intérieur, comme on va le voir maintenant, est peut-être significative…

Perspective 3 : Le Général Instin : une utopie hypermoderne de démocratisation de la création littéraire

E.B. : Dans le contexte de la numérisation ou pour mieux dire du passage au numérique du faire littéraire et de l’écriture créative, la possibilité du partage et de la collaboration s’avère être un atout. La démocratisation du web et l’accès « libre » aux réseaux sociaux a permis le développement de multiples formes d’écriture partagée : des fan fictions au microblogging (Gefen 2010), des romans transposés sur Twitter aux fictions sur Facebook écrites par des profils inconnus, aux ateliers littéraires numériques, les expériences et les expérimentations sont innombrables et tout nouvel outil engendre une panoplie de pratiques créatives.

En outre, le collectif est composé aussi du public et des lecteurs, qui pourraient passer leur temps à lire tout ce qui est produit et mis à la disposition de la communauté des internautes, comme les blogs, les sites des lecteurs, les blogs des maisons d’édition aussi.

Dans le cadre de cette situation de liberté, mais aussi dans le but d’explorer toutes les possibilités offertes par ces outils, à la fin du millénaire, dès 1997, un groupe d’artistes et d’écrivains a œuvré à la création d’un projet collectif : le Général Instin (GI). Plutôt que de retracer l’histoire de ce projet qui est désormais moins actif, nous vous donnerons un aperçu de la manière dont le travail en commun s’est développé par le retour de l’expérience de l’un des nombreux participants.

Né au tout départ de la rencontre, dans le monde réel, de la photographie spectrale du véritable général Hinstin par Patrick Chatelier au cimetière du Montparnasse, le GI est devenu une figure emblématique, source de toutes sortes de formes et de supports, du court-métrage à la cartographie, du street art à la musique, de la poésie au récit conventionnel, du slogan politique au statut Facebook, dont peuvent se saisir les participants à ce collectif sans manifeste, qui sont plus de 150 (citons entre autres, les participants à l’anthologie de 2015, Philippe Aigrain, Jean-Marie Barnaud, Sereine Berlottier, Anouck Bernet, Guénaël Boutouillet, Delphine Bretesché, Christophe Caillé, Éric Caligaris, Nicole Caligaris, Patrick Chatelier, Antoine Dufeu, Léo Duquesne, Claude Favre, Rémi Galibert, Maryse Hache, Ludovic Hary, Lili Hinstin, Maja Jantar, Christine Jeanney, Anne Kawala, Christophe Manon, MôMô Basta, Pierre Ouellet, Raymond Penblanc, Marc Perrin, Éric Pessan, Cécile Portier, Philippe Régnier, Mathilde Roux, Joachim Séné, Parham Shahrjerdi, SP 38, Anne Savelli, Alain Subilia, Fabienne Swiatly, Lucie Taïeb, Vincent Tholomé, Camille de Toledo, Valentina Traïanova, Pierre Antoine Villemaine, Benoît Vincent, Guillaume Vissac, Laurence Werner David).

Nicole Caligaris écrit :

Le Général Instin réunit sous son nom les fondements d’une littérature d’après la disparition de l’auteur : le texte vestige, fragment, sa transmission par citations, par évocations, par interprétations, gloses, variantes qui donnent naissance à tout un réseau de versions parallèles et successives, à une littérature spectrale en somme, le doute essentiel sur l’idée d’original, d’identité établie, de « leçon » de référence, autrement dit d’autorité. (Général Instin 2015a)

B.V. : Je ne sais pas, je m’interroge : le GI est-il hypermoderne ? N’est-ce pas, comme nous venons de l’entendre, tout ce qu’il y a de plus moderne, lié à la figure moderne de l’auteur ou la figure de l’auteur moderne, dont il semble qu’on a bien du mal à se défaire ?

J’en profite pour faire une incise : je reste littéralement épaté de voir toujours revenir (et dans ce colloque également) la tarte à la crème de la mort de l’auteur, avec les sempiternelles citations de Barthes et de Foucault, comme si depuis on n’avait pas avancé – et en particulier largement discuté et calmé le structuralisme et ses hormones.

Au-delà des questions strictement matérielles, il en va également de la dimension en quelque sorte fantasmatique de l’écriture et de l’auteur ; certains mouvements, je pense ici à l’Oulipo par exemple, mettent directement en jeu la question si ancienne, mais peut-être pas si démodée, de l’inspiration… J’avoue que j’ai été très influencé moi-même par Blanchot (dont Barthes et Foucault sont en quelque sorte des continuateurs), ayant véritablement commencé en littérature par un essai sur lui. On peut alors se poser cette question, plus romantique que postmoderne, plus mallarméenne que derridienne, si l’on veut… Comme dit Blanchot dans l’Entretien infini : « Je dédie (et dédis) ces pages incertaines aux livres où déjà se produit en se promettant l’absence de livre et qui furent écrits par –, mais que le défaut de nom ici seul les désigne dans l’amitié » (Blanchot 1969).

Même depuis cette inscription post soixante-huitarde, on a commencé à considérer d’autres expériences, d’autres temps, d’autres lieux. Tous les procédés d’escamotage de l’auteur, de Diderot ou Sterne ou même Rabelais jusqu’aux hétéronymes de Pessoa… Ou aujourd’hui l’exemple fracassant du post-exotisme représenté par Antoine Volodine. C’est à se demander si toutes ces questions sont vraiment nouvelles…

E.B. : Précisément, au milieu de la constellation des formes, performances, cinéma, radio, texte, et de tous les participants au collectif Général Instin, où se place Benoît Vincent ?

B.V. : Oui, le parcours est saisissant, qui en quelque sorte résout notre double problématique initiale, la double friction collectif/auteur + numérique/papier. C’est grâce au GI que j’ai véritablement commencé à discuter avec François Bon, en réalité, et que, par la suite, j’ai publié (les essais sur Blanchot et Quignard en tête) chez Publie.net ; de là j’ai publié chez Attila (Farigoule Bastard). D’où le schéma : collectif > internet > papier > auteur

Ironie du sort ! Je vais donc lire ce tout premier texte, quelques fragments.

LECTURE 1 Benoît Vincent,Végétal Instin in Général Instin (2015a)

E.B. : Je rebondis en évoquant cette citation de Thierry Crouzet, qui nous permet d’aborder une autre dimension du problème :

J’anticipe un prochain colloque où un universitaire fera le parallèle entre cette version papier de mon blog et sa version en ligne… Je l’arrête tout de suite. Les mots sont les mêmes, l’intention identique, la forme s’altère, mais pas davantage que quand je fais évoluer le template de mon blog, ajoutant quelques lignes de code pour qu’il suive l’évolution technologique. Je ne dis pas que tout cela est sans signification, bien au contraire, mais la signification doit être cherchée dans le texte […]. (Crouzet 2018)

Comment et pourquoi êtes-vous passés, comme collectif, au papier après tout le travail d’écriture développé sur le web ?

B.V. : Le projet éditorial, sauf erreur de ma part, est le fruit du dialogue entre Patrick Chatelier, l’initiateur du Général, et Benoît Virot, l’éditeur du Nouvel Attila. L’idée étant de produire un certain nombre de volumes (papiers donc) qui rendent compte d’une partie au moins des productions très hétérogènes du collectif. On notera d’ailleurs sur le champ que le collectif ne produit pas, ou très marginalement, des auteurs ou autrices de renom, ce sont plutôt des autrices et des auteurs installé(e)s qui se saisissent, temporairement de la figure du GI (on pense à Lucie Taïeb, à Christophe Manon)… Le Nouvel Attila publiera ainsi trois ouvrages, qui sont : une Anthologie de nombreuses interventions (ou manifestations) du GI (livre accompagné d’un CD) (Général Instin 2015a) ; la traduction (par le GI) du célèbre recueil d’Edgar Lee Masters, Spoon River (Général Instin 2015a) ; un récit collectif, écrit à dix puis cinq mains, Climax (2015b). Et puis après quelques soubresauts, les autres volumes prévus (un Lexique GI, et probablement un ensemble de Conférences sur les conférences sur l’autorité du GI) n’ayant pas vu le jour, le collectif s’est comme dissipé de lui-même – normal pour une figure spectrale ! Nous avions tenté de déjouer l’autorité, de tromper l’adversaire, en recourant à des stratagèmes subtils. Par exemple, nous avons pensé contourner la figure de l’auteur en passant par la traduction. Et nous avons même choisi un texte à traduire idéal : un texte polyphonique dont tous les auteurs étaient des morts. Des morts qui parlent, c’est-à-dire des fantômes. Un livre publié l’année de la mort du Général. C’était génial ! Et je vais vous lire l’un de ces textes de la traduction du GI de l’Anthologie de Spoon River d’Edgar Lee Masters. Mieux : nous avons également proposé à d’autres auteurs, à quiconque, de se saisir de personnages de l’anthologie qui n’avaient pas leur propre texte, leur propre épitaphe, et nous avons ainsi tressé une myriade de poèmes à partir de la pelote initiale de Masters, créant ainsi des échos, des variations, des délayages propres – à mon avis – à la forme littéraire moderne.

LECTURE 2 Edgar Lee Masters,Webster Ford, version de Benoît Vincent et Soldat Inconnu, version de Lucie Taïeb in Spoon River (prolongations).

C’est une bonne question que celle de Thierry Crouzet ; puisqu’on est dans un colloque, j’essaie de répondre sur la nécessité du papier et je lève une contradiction. Le collectif s’est attaché aux bouquins car c’était également un moyen de le rendre plus visible, de l’ancrer précisément dans une réalité qui n’était pas que celle, éphémère quoi qu’on en dise, de l’internet. Or dans le même temps, par un effet que j’appellerai (et cela n’engage ici que moi) pernicieux, la puissance même de l’objet livre a de facto imposé la figure de son démiurge, à savoir l’auteur, né alors et identifié comme tel, Général Instin. Or comme le collectif ne répondait à aucune règle, ne suivait pas de manifeste, il se peut que cette soudaine « prise » a comme « figé » la dynamique collective. J’ajoute – et une fois encore ceci n’engage ici que moi – que la figure de l’auteur derrière le GI, n’était-elle pas simplement celle de son initiateur, à savoir Patrick Chatelier ? Quoi qu’il en soit, il s’est produit, « à cause » du livre, comme une espèce de renversement du « Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος – In principio erat Verbum » : le livre, dans sa forclusion, a comme piégé le collectif et l’a fait péricliter, l’a littéralement précipité. Enfin Climax reste pour moi la grande réussite de tout le projet, un véritable petit roman collectif, d’une facture très originale, et à la puissance poétique qui doit être quelque chose comme le fruit de l’énergie du groupe ?

LECTURE 3 Climax.

Remarques finales : du collectif à la communauté, et que reste-t-il de l’auteur ?

E.B. : Lors une récente journée d’étude ayant eu lieu au Centre Wallonie-Bruxelles (octobre 2021), Alexandra Saemmer a remarqué à propos d’une expérience d’écriture collective sur Facebook que « l’écriture de la fiction était passionnante pour les écrivains et pas pour les lecteurs. » Et toujours à propos du même projet elle a expliqué que « [l]a remédiation par la publication donne une valeur autre à l’ouvrage et que le passage par un éditeur papier crée l’écrivain ». On revient ainsi aux questionnements de tout à l’heure et je vous demande : est-ce qu’on peut supprimer l’auteur ? Pourquoi le ferait-on ? Et qu’en est-il de l’auteur sur internet ?

B.V. : Il me semble que l’expérience même du GI, et mon expérience au sein du GI, et mon parcours, qui n’est sans doute pas si original que cela, répondent à leur manière à ces questions, qui sont destinées sans doute à rester sans réponse… On voulait se débarrasser de l’auteur, dans un mouvement de sape de valeurs anciennes, qui nous paraissaient démodées, patriarcales, autoritaires, etc. Cela part d’un bon sentiment, mais, après des dizaines d’années de ces postures chevaleresques, on ne peut que constater que le livre comme l’auteur restent des figures présentes. On pourrait se demander aussi pourquoi on supprimerait l’auteur… l’auteur disparu (le père, le mâle, le chef), qu’est-ce qui le remplace ? Que met-on à la place du roi quand le roi a perdu sa tête ? Quel est le sens, par exemple, d’un nom propre comme « Wu Ming 3 » ? Pourquoi identifier, personnaliser un membre anonyme d’un collectif, dont le nom même, Wu Ming, titré du Tao, signifie le Sans Nom ? Et comment gère-t-on le risque de transcendance, jaloux de cette place vacante ? Je ne sais pas si l’on peut répondre à ces questions, mais je sais qu’on pourrait insister sur ce fait : un collectif d’intérêt ne fait pas une communauté de destin ; il y a donc une question politique derrière tout ça. Avec Philippe Aigrain on avait entamé un texte critique sur les différents collectifs récents, si répandus dans la littérature française, mais chacun avec ses particularités. Je me demandais finalement si la NRF n’était pas un projet beaucoup plus politiquement pertinent que les Surréalistes ?

Apostille

E.B. : « Le nœud du problème est d’abord et avant tout institutionnel », dit Servanne Monjour dans « La littérature numérique n’existe pas » (2020). Et je voudrais conclure avec une dernière citation, extraite de la préface à un ouvrage paru en 2007, donc à l’époque de l’essor du web 2.0, où Jean Clément proposait en introduction un constat qui me semble encore valide quinze ans plus tard :

Pour la majorité d’entre eux (les acteurs du domaine du livre, qu’ils soient auteurs, éditeurs, journalistes, critiques, libraires ou enseignants), comme pour le public, toute littérature doit aboutir à un livre. Certes la chaîne de production du livre est aujourd’hui presque entièrement numérique, de son écriture sur traitement de texte à sa distribution dans les librairies en ligne, en passant par sa mise en page et son maquettage chez l’éditeur. Mais le produit final – celui que le lecteur a entre les mains – est un objet de papier, fait de pages imprimées, numérotées et reliées sous une couverture. Cet objet semble irremplaçable. (Clément 2007)

Bibliographie

Benjamin, Walter. s. d. « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproduction mécanisée (I à V) [1935-1955] ». Revue Hors-Sol. https://hors-sol.net/revue/walter-benjamin-l-oeuvre-d-art-l-heure-de-sa-reproduction-mecanisee-1-5/.
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Clément, Jean. 2007. « Préface. Une Littérature problématique ». In Un laboratoire de littératures, édité par Serge Bouchardon, 11‑20. Paris: Éditions de la Bibliothèque publique d’information. https://doi.org/10.4000/books.bibpompidou.214.
Crouzet, Thierry. 2018. « La littérature numérique est morte ». Thierry Crouzet. https://tcrouzet.com/2018/03/30/la-litterature-numerique-est-morte/.
Gefen, Alexandre. 2010. « Ce que les réseaux font à la littérature ». Itinéraires. Littérature, textes, cultures, nᵒ 2010-2 (juillet):155‑66. https://doi.org/10.4000/itineraires.2065.
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Gosselin, Sophie, et Franck Cormerais. 2008. Poétique(s) du numérique. L’électron musagète. Montpellier: L’Entretemps.
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Monjour, Servanne. 2020. « Digital literature does not exist. Literariness viewed through the connotations of the new media imaginary ». Communication langages 205 (3):5‑27. https://www.cairn-int.info/article-E_COMLA1_205_0005--digital-literature-does-not-exist.htm.
Piret, Pierre. 2007. La littérature à l’ère de la reproductibilité technique: Réponses littéraires aux nouveaux dispositifs représentatifs créés par les médias modernes : Penser la représentation I. Champs visuels. Paris: l’Harmattan.
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Vincent, Benoît. 2015. Farigoule Bastard. Paris: Le Nouvel Attila.
Vincent, Benoît. 2020. La littérature inquiète: lire écrire. Montpellier: Publie.net.
Bricco Elisa 0000-0002-5977-7549
Vincent Benoît
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Communautés et écriture en ligne
Histoire, devenir, un dialogue
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Benoît Vincent
Département des littératures de langue française
2104-3272
Sens public 2024/12/20 L’écrivain et la machine. Figures auctoriales à l’ère du numérique
Dans cet entretien, Elisa Bricco discute avec l’écrivain Benoît Vincent sur les transformations qui sont survenues dans les vingt dernières années à cause du tournant technologique de la production littéraire. On s’interroge sur les répercussions de l’emprise de la technologie sur le faire littéraire et notamment sur le développement de la notion d’auteur dans le contexte de l’écriture collective. L’exemple du projet Général Instin servira pour mettre en lumières quelques enjeux du numérique par rapport à la production de textes littéraires.
In this interview, Elisa Bricco talks to writer Benoît Vincent about the transformations that have taken place over the last twenty years as a result of the technological turn in literary production. We look at the repercussions of technology’s hold over literary production, and in particular at the development of the notion of author in the context of collective writing. The example of the Général Instin project will be used to highlight some of the issues raised by digital technology in relation to the production of literary texts.
Communauté http://data.culture.fr/thesaurus/resource/ark:/67717/T990-550
Littérature http://data.culture.fr/thesaurus/resource/ark:/67717/T990-1210
littérature numérique, Général Instin, communauté, réproductibilité technique, publication numérique, digital
digital literature, Général Instin, community, technical reproducibility, digital publishing, digital